Créé au Gymnase du lycée Saint Joseph dans le cadre de la 73ème édition du Festival d'Avignon, Dévotion - Dernière offrande aux dieux morts a été écrit et mis en scène par Clément Bondu pour accompagner la sortie des 14 comédiens de l’École supérieure d’art dramatique de Paris (ESAD - promotion 2019). Le spectacle nous invite à suivre un récit à histoires multiples en trois actes, dévolus successivement à l'intime, au politique, puis à la fête et au sacré. Il convoque les fantômes de l'Europe et fait du théâtre le lieu de la parole, hors de tout didactisme. Une véritable ménagerie humaine, où la figure du poète est celle du Mal, où l'Idiot dostoïevskien est de retour, où Ophélia conte encore sa mort. Une chambre qui n'est donc pas une chambre mais un monde qui permet au spectateur de découvrir de nouveaux visages et de nouvelles existences sous les cendres de l'époque.
Nous avons pensé la scénographie de Dévotion comme un espace évolutif, au service des trois actes de la pièce. Le premier est celui de l'intime, représentant les chambres respectives de H. (Hamlet) - dont l'architecture bourgeoise a été vieillie par le temps - et celle de l'Idiot - chambre d'hôtel lugubre illustrée par un aplat de papier peint démodé et un néon accroché au mur.
Le deuxième acte est celui du politique avec la mise en place du "Club du mouvement", espace hybride représentant le bar du Parti du Progrès, club fasciste où tous les codes du nationalisme sont permis. Bien que les éléments de décor soient identiques à l'acte 1, c'est le mouvement des châssis à la face et l'accessoirisation de l'ensemble qui permet de passer d'un espace à l'autre. Les livres de la chambre de H. laissent place aux nombreuses bouteilles du bar du Club. Le papier peint de la chambre de l'Idiot est retiré pendant le changement et nous donne à voir un mur en lambris et un miroir, inspiré des lieux alternatifs cachés, en souterrain, où la déco semble avoir été figé dans le temps.
Le dernier acte est celui de la "fête des morts", lieu de résurgence de figures lointaines, des héros oubliés, fantômes de l'Europe. Dans la pièce, tous les personnages se réunissent pour fêter l'enterrement de l'Idiot, un jeu ridicule mais profondément joyeux où tout le monde fini par danser. Les deux châssis présents depuis le début du spectacle se retournent au lointain et forment un très grand cimetière, inspiré des caveaux Argentins construits en hauteur. Au sol, une grande mare donne le signe que nous sommes dans la nuit humide d'une forêt.